Compte-rendu des commissions Littérature enfantine et Albums d'enfants, congrès de Paris
Nous avons fait du bien meilleur travail qu’à Nantes. Il y a eu moins de dispersion et le thème du congrès nous concernait davantage.
À l’issue de la démonstration de Madame Denis, de nombreux camarades ont posé des questions. Nous y avons répondu sur-le-champ puis nous nous sommes réunis dans la salle de la commission pour une discussion plus approfondie. Cette formule est à retenir.
Nous avons pu préciser plusieurs points importants :
1) Lorsqu’on crée des albums ou des contes enfantins, on fait de la psychothérapeutique sans le savoir. À côté de l’aspect artistique, culturel de l’album, il y a cet aspect de la libération psychique de l’enfant qui est vraiment primordial.
Nous devons donc introduire cette technique dans nos classes.
2) Quelle doit être la part du maître ?
– Il faut qu’il crée dans la classe un climat de liberté qui permette à l’enfant de s’épanouir. Pour cela, il faut qu’il se donne beaucoup, surtout au départ.
– Il doit savoir s’effacer à temps. Le maître est déformé par les influences reçues et ne sait pas toujours dépasser un certain conformisme. Il est à l’origine du mélodrame, du pompier. Il doit s’effacer devant l’enfant qui, lui, est toujours original parce qu’il n’essaie pas de s’insérer dans des cadres préétablis.
3) Les formes d’albums peuvent être variées à l’infini. Il y a l’album de longue haleine qui peut durer un ou plusieurs mois et il y a l’album rapide terminé dans la journée ou dans la semaine. Les thèmes artificiels sont difficiles, il vaut mieux partir d’un thème de la vie réelle.
4) Les maîtres des CM – CFEP – CC – doivent introduire la technique de l’album ou du conte dans leur classe.
En effet, il existe actuellement une sorte de romantisme scientifique de la jeunesse. Il faut qu’il s’épanouisse dans nos classes. Maintenant, la réalité dépasse la fiction. Nous sommes à une époque enthousiasmante, aux perspectives infinies. Il nous faut tous être à l’heure de notre époque ; il nous faut être modernes.
5) Sur le plan pratique :
Création d’une chaîne d’albums pour les maîtres. Michel DION, Einville-au-Jard (M et M) fait le recensement de tous ceux qui veulent essayer quelque chose. Chacun des participants insère à la chaîne un album né de la vie, de l’imagination, d’un dessin, d’un texte etc. Et chacun fait part des questions, des réflexions, des critiques que font naître les œuvres qu’il reçoit.
La chaîne aboutit à Élise qui peut par ses conseils, faire progresser ainsi un plus grand ensemble de camarades.
Nous constituerons d’abord une chaîne nationale, puis nous arriverons à des chaînes régionales et même départementales. Paul Le Bohec
Réflexions sur la part du maître
La part du maître ?
C’est de permettre
d’être comme partout
et comme nulle part.
C’est d’être un père, une mère,
un parrain toujours prêt
et même un tout petit peu prêtre.
C’est de ne pas s’accepter linéaire
mais de se porter au carré.
C’est la tutti-valence
et la polytechnicité
C’est l’addition des joies
la soustraction des peines
la multiplication des pouvoirs
le partage des bonheurs.
C’est la remontée en enfance.
C’est d’être premier de cordée
dans la montagne à vaches
et dernier de cordée
passé la forêt.
C’est d’offrir modestement
à l’enfant, l’univers entier.
C’est d’armer des caravelles
pour chacun de ses élèves.
C’est la volonté et la réussite
de les aimer tous.
C’est la météo, la voyance, la lucidité.
C’est avec les parents
de sarcler les événements
d’améliorer les climats
de transformer le monde.
Paul Le Bohec
Texte paru dans l’éducateur n°22-23 édition technologique, 20 mai-1er juin 1958, p.15-16
(le travail des commissions au congrès de Paris)