« Cette technique de l’album, sans en bien discerner les raisons, je sens qu’elle est fondamentale. Elle aide à vivre. »
[…]
Milieu :
« On pourrait croire qu’avec la mer, j’ai un milieu en or. Mais tous les milieux sont originaux quand on les voit avec les yeux de l’étranger. C’est ça le rôle du maître […] faire prendre conscience de l’originalité du milieu. Il faut aussi dans les choses les plus banales, voir l’original. Il faut chercher la pépite. Quel mur n’a pas son condottiere en filigrane. Quel poteau électrique n’a pas son lierre. Quel événement, quel paysage n’a son ombre, son harmonie.
Mais le maître doit être réceptif à l’extrême. Il lui faut fréquemment APPOLINAIRE, RIMBAUD, PAUL ELUARD, ARAGON, CLAUDEL, ST JOHN PERSE, SUPERVIELLE, LA CHANDELLE VERTE, PICASSO, MATISSE, ANDRE LHOTE, ZOLA, ARAGON, TEILHARD DE CHARDIN, CLAUDE ROY…
[…] Il lui faut fréquenter les maîtres pour s’enrichir.
[…] Je pense à Mozart si exigeant. Si vous ne lui donnez qu’un peu de vous-même, il ne vous livre rien. Mais si vous apportez tout de vous, alors il déroulera ses sortilèges. Il faut devenir mélomane. Comment ? en écoutant. Il faut comprendre la peinture. Comment ? en regardant. II faut être poète, en écoutant, en regardant, en s’écoutant. Il faut donner beaucoup de soi-même aux êtres et aux choses. Et surtout, il faut se battre, refuser la grisaille, il ne faut rien accepter, il faut être chercheur d’or, cela seul vaut la peine de vivre. »
Climat d’un album :
« […] Il n’y a pas que la poésie-poésie. Il y a le sens comique, il y a le tragique, le poignant. Pour n’être point due aux images, la beauté d’un album n’en peut pas moins exister, si elle est centrée sur l’émotion, sur la beauté du texte, le drame caché, les larmes retenues, ou l’humeur déchainée. Dans le dessin, il y a la caricature. Les voies de la beauté sont impénétrables. »
Paul Le Bohec
Extrait par Paulette Quarante d’un cahier de roulement pour le compte rendu de la commission Albums d’enfants
Article paru dans l’éducateur n°12, 15 mars 1959, p.342-344