Navigation dans l'œuvre de Paul Le Bohec, pour une école réparatrice de destins
Navigation dans l'œuvre de Paul Le Bohec, pour une école réparatrice de destins

Jeannette

Jeannette ne voulait pas de bruit autour de sa disparition.

Son premier apport :
« Sa » méthode naturelle de lecture.
S’appuyer sur l’affectivité liée à la mémoire.
Affichage quotidien du texte du jour.
(Voir : Une méthode naturelle : l’écrilecture, éditions ICEM)

Second apport :
Une aventure graphique et picturale sur vingt-trois années en continu.
Sans l’avoir cherché, elle a démontré que, contrairement à Malraux qui soutenait que « l’art possède l’enfant ; l’enfant ne possède pas son art », l’enfant pouvait être maître du sien. Cela apparaissait au milieu du CE1 et s’épanouissait étonnamment par la suite.

Elle avait tout essayé dans son CP-CE1-CE2 (de 30 à 36 élèves) et en était arrivée aux conclusions suivantes :

– Organisation matérielle impeccable : outils (crayons, pinceaux, couleurs, supports...) en bon état... Atelier toujours en place : table de travail, dossiers, tiroirs. Donner du temps : classe, récréations, interclasse de la cantine.
– Accumulation des expériences ; tâtonnements nombreux avant d’obtenir un minimum de maîtrise et déboucher sur son chemin personnel dans la ligne de ses données personnelles de départ.
– Pas de socialisation des œuvres par crainte de l’établissement de critères de réussite par le groupe limité dans ses étroites conceptions.
– Affichage seulement de ce qui était nouveau pour ouvrir au maximum le champ de la liberté.
– Chacun se construisait librement son chemin en « incorporant à sa chaîne en cours de construction des éléments qu’il trouvait dans son environnement. » (Freinet)
– Pas de compliments bloquants. Un seul possible commentaire : « C’est nouveau ». Les enfants étaient indifférents à l’affichage. Ils ne se préoccupaient que de ce qu’ils allaient maintenant faire.
– Ne pas offrir toutes les possibilités à la fois pour éviter de ne construire qu’une quantité de fondations sur lesquelles aucun bâtiment ne pourrait s’ériger. La base : dessin, peinture, pâte à modeler. Après, on pouvait passer à diverses applications : gravure, vitraux, tapisseries, monotypes, constructions en carton, sculpture etc.
– Cette détermination de l’existence d’un chemin personnel à construire dans tous les domaines : « II n’y a pas de sentier préalable, le chemin se fait en marchant » (Machado), a été confirmé et illustré par « Qu’ont-ils fait du dessin ? » (Éditions ICEM) et « Rémi à la conquête du langage écrit » (Odilon).

Paul Le Bohec

Texte paru dans Coopération Pédagogique N°138, janvier 2005
Texte paru dans le Bulletin des Amis de Freinet N°82, mars 2005, p.13